Bouton du type "j'aime pas" sur Facebook
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Dans une allocution mardi, Mark Zuckerberg a laissé entendre qu'un bouton pour marquer son désaccord ou sa compassion vis-à-vis d'un statut Facebook pourrait voir le jour. Analyse des conséquences avec le psychologue et expert du numérique, Michael Stora.
Les pouces baissés vont-ils bientôt envahir votre timeline? Interrogé lors d'une séance de questions-réponses mardi, le patron deFacebook Mark Zuckerberg a ouvert la porte à l'instauration d'une sorte de bouton "dislike", une demande récurrente ces dernières années. Pour l'heure, les utilisateurs du réseau social ne peuvent que marquer leur approbation ou leur contentement vis-à-vis d'une publication en "likant".
Le projet de Facebook consisterait moins à les laisser exprimer leur opposition que leur "empathie" ou leur désarroi face à quelque chose qu'ils ne peuvent pas aimer. La dénomination retenue ne devrait donc
pas être "je n'aime pas" mais plutôt "je compatis". "Nous ne voulons pas transformer Facebook en un forum où les gens votent pour ou contre les publications des gens", a expliqué le fondateur du réseau social.
Psychologue et psychanalyste, Michael Stora travaille sur les problématiques du numérique. Il explique à L'Express en quoi cette "révolution" est une bonne chose.
Pourquoi Facebook a-t-il attendu si longtemps avant d'ouvrir cette possibilité?
Michael Stora - Je pense que c'est en raison de cette mentalité très anglo-saxonne de ne vouloir mettre en avant que les pensées positives, de mettre en valeur uniquement ce qui va bien. Il y a cette tendance du "So nice" et du "Yes man" à dire "tout est beau et bien". A cela s'ajoute cette culture américaine du "self-made man" consistant à dire que l'image que l'on véhicule de soi doit être bonne. C'est une société très narcissique.
Peut-être que Facebook a voulu casser cette image et a pris conscience qu'on ne peut pas être positif tout le temps, d'autant avec ce qu'il se passe dans le monde aujourd'hui. Un réseau social ne doit pas idéaliser et doit être à l'image de ce qu'est la société dans la vraie vie, dans les bons et mauvais côtés. Etre "dislike", c'est aussi être humain et dire ses sentiments. Facebook doit faire son travail de citoyenneté. C'est la fin d'une ère.
Qu'est-ce qu'un bouton "empathie" peut changer dans les relations entre utilisateurs?
Ne mettre qu'un seul bouton a entraîné des situations folles où des personnes pouvaient évoquer des choses dramatiques et récolter en retour des "j'aime" cyniques ou second degré. Vu les paroles racistes, sexistes ou destructrices qui se propagent, on le voit avec les migrants, il est important de pouvoir marquer son désaccord. Ce bouton permettra de montrer qu'on peut être dans la capacité de comprendre la souffrance de quelqu'un.
Récemment, une collègue a publié un statut dans lequel elle expliquait être atteinte d'un cancer. J'ai bien vu que personne ne
savait vraiment comment réagir. On peut évidemment poster des commentaires de soutien mais pas exprimer une compassion distanciée. Après, évidemment c'est artificiel. Le "dislike" peut rapprocher les gens mais cela reste une logique d'audimat. On compte combien on en a. Le numérique n'est qu'un relai, c'est dans la vraie vie que l'on voit si la compassion se confirme.
Pourquoi ne pas instaurer un bouton "je n'aime pas", appelé tel quel?
Je pense que c'est pour rendre l'utilisateur plus adulte et intelligent et ne pas rester dans ce prisme enfantin j'aime/j'aime pas. Le terme d'empathie induit transmettre des émotions, mettre de l'affection. Boris Cyrulnik disait bien qu'à force d'être derrière leurs écrans, les adolescents ne développent pas d'empathie et deviennent des pervers narcissiques. Evidemment, le terme est excessif. On ne connait pas tous très bien nos amis Facebook.
N'y avait-il pas un risque que le bouton "j'aime pas" entraîne des harcèlements? Par exemple, lorsqu'un utilisateur publie quelque
chose de positif ou d'intime?
Les rageux et les "trolls" qui veulent tout casser existaient déjà avant ce bouton. C'est dans les commentaires la plupart du temps qu'ils harcèlent, avec des phrases assassines ou des photos. Le harcèlement a toujours existé sur Facebook et il y a des moyens de le signaler. Sur d'autres réseaux sociaux, comme Youtube, il y a des "dislikes". Et ce n'est pas toujours pour se moquer mais aussi dire qu'on aime pas. Il est important d'avoir des moyens de critiquer.
L Express
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