Il y a urgence à s'entendre sur les migrants, a encore répété dimanche la Commission européenne après la décision de l'Allemagne de réintroduire des contrôles à ses frontières, notamment avec l'Autriche. Un conseil extraordinaire réunissant les ministres de l'Intérieur et de la Justice de l'Union européenne doit se pencher sur la question lundi à Bruxelles. Les intervenants devraient notamment débattre des propositions de répartition des migrants faites mercredi dernier par le président de la Commission européenne. Jean-Claude Juncker avait alors demandé aux États membres de donner leur feu vert sous cinq jours. Seulement, à la veille de cette échéance, des divisions béantes les séparent toujours.
• Que prévoient les propositions de Jean-Claude Juncker?
Lors de son premier discours sur l'état de l'Union, largement dominé par la pire crise migratoire en Europe depuis 1945, le président de la Commission avait exhorté les États membres à se répartir dès la semaine prochaine l'accueil de 160.000 réfugiés. Selon ce plan, l'Allemagne, qui doit en accueillir environ 26%, la France (20%) et l'Espagne (12%), seront les principaux pays mis à contribution. Jean-Claude Juncker a, en outre, préconisé qu'après ces mesures d'urgence, «un mécanisme de relocalisation permanent» et contraignant soit adopté. Ces mesures ont reçu dès jeudi l'assentiment du Parlement européen. Au passage, les députés ont dénoncé dans une résolution le «manque de solidarité regrettable des gouvernements envers les demandeurs d'asile».
• Qui s'oppose à la répartition des réfugiés?
La chancelière allemande Angela Merkel a, elle aussi, réclamé une «répartition contraignante» entre tous les pays. Celle-ci doit s'appliquer sans plafond global. Car son pays attend 40.000 réfugiés rien que ce week-end, soit le quart des 160.000 arrivants que la Commission européenne souhaite répartir dès la semaine prochaine dans l'ensemble de l'UE. L'idée passe mal en Europe centrale, notamment auprès des pays du groupe de Visegrad: Pologne, République tchèque, Slovaquie et Hongrie. Rentrés dans l'Union européenne en 2004 avec l'appui marqué de Berlin, ces pays défient aujourd'hui la chancelière Angela Merkel. Ces quatre pays ne devraient, de leur côté, accueillir que quelques milliers de réfugiés. Le Danemark, traversé par les réfugiés voulant se rendre en Suède, et la Roumanie sont sur la même longueur d'onde.
• Comment se préparent la France et l'Allemagne?
La France et l'Allemagne comptent bien parler d'une même voix: Paris et Berlin appuient la création d'un système de répartition contraignant des demandeurs d'asile à travers l'UE. Bernard Cazeneuve s'est ainsi entretenu dimanche après-midi avec son homologue allemand, Thomas de Maizière, de l'évolution de la situation en Europe, alors que l'Allemagne a annoncé le rétablissement provisoire de contrôles à ses frontières avec l'Autriche. Cet entretien «a permis de conforter la position commune franco-allemande», précise le ministère français. François Hollande et Angela Merkel se sont également entretenus dans la soirée sur cette même question. «L'Allemagne et la France se sont mises d'accord pour préparer ensemble le conseil de l'UE de demain», précise une porte-parole du gouvernement allemand.
• La réunion de lundi a-t-elle une chance d'aboutir?
Vendredi, le ministre allemand des Affaires étrangères s'est rendu à Prague avec son homologue luxembourgeois, dont le pays assure la présidence tournante de l'UE. Ils ont tenté de convaincre le groupe de Visegrad. En vain. À la veille de la rencontre, le premier ministre slovaque, Robert Fico, a répété dimanche que son pays s'opposerait aux quotas de migrants. Même son de cloche en République tchèque. «Les quotas ne fonctionneront pas, les gens qui demandent l'asile en Europe, ne le demandent pas en Hongrie, Slovaquie, Roumanie, ou en République tchèque mais en Allemagne ou en Suède, parce qu'ils veulent y vivre», a déclaré le chef du gouvernement, Bohuslav Sobotka. Et, si les Européens ne surmontent pas leurs divisions, un sommet des Vingt-Huit au niveau des chefs d'État et de gouvernement sera convoqué, a d'ores et déjà prévenu le président du Conseil européen, Donald Tusk.
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