Fermeture de maisons médicales : la nouvelle victime de la politique d’austérité sociale
Kadir Duran / Bruxelles Korner
Il y a dix jours, plusieurs maisons médicales situées à Schaerbeek, Evere, Saint-Josse et Auderghem apprenaient que leur contrat au forfait était résilié par les mutualités. Une décision brutale qui a des conséquences lourdes : deux établissements, Albert II à Schaerbeek et Santé+ à Evere, fréquentés par quelque 5.400 patients, ferment définitivement leurs portes.
Le Dr Irshad Nobeebux, responsable de ces maisons médicales, explique que l’INAMI et les mutualités leur reprocheraient d’être devenus des « structures trop importantes ». Mais derrière cet argument administratif, se profilent des enjeux bien plus graves.
Soupçons et fermeture
Certaines maisons médicales sont aujourd’hui soupçonnées de méfaits, sans qu’aucune information précise n’ait encore été rendue publique. Quoi qu’il en soit, la décision de fermer ces centres de soins de première ligne pénalise en premier lieu des milliers de patients précaires qui y trouvaient un accès facilité aux soins de santé.
Une politique de stigmatisation généralisée
Ces fermetures s’inscrivent dans un contexte plus large : celui de la politique ultralibérale menée par le gouvernement actuel, surnommé « l’Arizona ». Dans cette vision politique, toute personne — qu’elle soit chômeuse ou malade — doit être “productive”. La douleur, la maladie, l’épuisement professionnel (burn-out) sont perçus non pas comme des réalités médicales, mais comme des simulacres à éradiquer.
L’objectif est clair : réduire au strict minimum les allocations sociales, reporter l’âge de la retraite et forcer le plus grand nombre à rester dans le circuit du travail, sans prise en compte des limites physiques ou mentales. Pour les malades chroniques et les travailleurs usés, aucune clémence : l’idéal de l’Arizona ne connaît pas d’âge pour l’acharnement.
Transformation radicale de la sécurité sociale
Les mutualités et les médecins sont aussi sommés de s’adapter. Désormais, délivrer un certificat médical pourrait nécessiter l’intervention de médecins « spécialisés », allongeant et complexifiant l’accès aux congés de maladie.
Cette évolution vise à pousser les patients “trop malades” vers des procédures lourdes et dissuasives, favorisant indirectement l’exclusion des plus faibles du système de soins. Les maisons médicales, historiquement proches des classes populaires, sont particulièrement visées : elles deviennent un champ de bataille entre une vision solidaire de la santé et une logique purement économique.
Une erreur économique et sociale majeure
Derrière cette offensive, se cache un choix politique dangereux : croire que forcer tout le monde au travail stimulera l’économie. Mais les chômeurs sans formation et les malades sous pression ne répondront pas aux attentes des employeurs. Ce n’est pas en asséchant les allocations sociales que l’on comblera les déficits publics ; surtout quand ces déficits résultent d’années de mauvaise gestion politique, portée par les mêmes acteurs aujourd’hui au pouvoir.
La véritable solution est ailleurs : dans l’investissement massif dans les nouvelles technologies, dans la stimulation de l’innovation, dans l’exportation du savoir-faire. Pas dans la répression sociale ni dans le rationnement du minimum vital.
Changer la répartition des compétences entre les Régions ne sortira pas la Belgique de la crise. Cela ne fera qu’accélérer une séparation des États fédérés, au bénéfice d’une minorité politique représentée notamment par Bart De Wever.
À l’heure actuelle, il serait bon de rappeler que l’État, s’il veut durer, doit protéger ses citoyens les plus vulnérables, et non les sacrifier sur l’autel de dogmes économiques périmés.
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